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Un apéro avec Maud Ventura : « Mes éditrices doivent m’arracher mon manuscrit »

Pour n’importe quelle star de la chanson qui s’épanche sur son métier, il est toujours question de passion, de beauté du geste, d’accident aussi. A les entendre, le vœu de célébrité n’a jamais existé si ce n’est enfant, devant un parterre de peluches, avec une brosse pour micro : « Je n’imaginais pas un jour recevoir ce Grammy… ! » Les illustres de la pop disent à peu près tous la même chose, ils n’ont jamais voulu être immortels et seraient plus heureux sans tous les tralalas. Est-ce bien vrai ? A 31 ans, Maud Ventura lève le tabou de l’addiction à la gloire dans son deuxième roman, Célèbre (L’Iconoclaste, 145 pages, 21,90 euros).
« Pendant l’écriture, j’avais un Post-it collé au-dessus de mon bureau avec cette consigne : ce livre doit être l’autobiographie intérieure d’Angèle, de Miley Cyrus, de Dua Lipa… Tout ce qu’elles pensent, mais qu’elles ne peuvent pas dire en interview aura sa place dans le récit. » Son héroïne, Cléo Louvent, indéniable beauté et timbre inimitable, entend mettre le monde entier à ses pieds, y travaille sans relâche, parvient à son but grâce à la chanson I Feel Nothing qui en dit long sur son indifférence aux fans et souffre d’un écrasant complexe de supériorité. Une immersion vertigineuse dans la tête et le corps d’une diva.
Nous avons rejoint Maud Ventura au Café du Rendez-Vous, une grande brasserie du 14e arrondissement de Paris, place Denfert-Rochereau, près de la sortie du RER. C’est ici, à la petite table juste derrière nous, qu’elle a écrit son premier livre, Mon mari (L’Iconoclaste, 2021), le récit d’une femme obsédée par sa moitié, vendu à près de 400 000 exemplaires en France – un exploit ! – et le début de Célèbre. Une autre histoire de fixette. Son jus de pamplemousse-orange-citron pressé, ses grands yeux ouverts à la surface de son verre et ses cheveux mi-longs de fin d’été lui donnent un air d’observatrice candide qui se prend aussi peu au sérieux que ses livres. Elle se ratatine volontiers pour récupérer nos lunettes qui n’arrêtent pas de glisser sous la banquette.
« Je n’étouffe pas mon humour. Au fond, j’ai l’intuition qu’il ne va pas dénaturer ou amoindrir mon propos, je ne me sens pas menacée par lui, déclare-t-elle avec le sourire. Pour moi, intelligence et précision n’ont jamais été incompatibles avec une forme de légèreté, même si ce n’est pas une idée très admise, surtout dans le milieu littéraire. »
Ses créoles ondulées comme des lianes gigotent autour de son visage et donnent à cet apéro un air de fête. Un cadeau qu’elle s’est offert à l’occasion du pot de célébration du prix Goncourt de Jean-Baptiste Andrea (Veiller sur elle, 2023), lui aussi publié par la petite maison d’édition L’Iconoclaste. Ces bijoux, c’est aussi la certitude d’être tombée au bon endroit.
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